Mardi 7 janvier 2020 à 14h00  


Intervenant : Jean-Yves RUAUX, historien.

La Corée, une étrangeté si familière

 

*** Avertissement ***

Les comptes rendus que nous vous présentons sont tirés des notes que nous prenons à titre tout à fait personnel pendant les conférences. Elles retracent l’exposé du conférencier, en étant quelquefois augmentées d’éléments de documentation trouvés sur Internet. Elles visent à vous remettre en mémoire les conférences, sans prétendre à une exactitude parfaite.

___________________________________________________________________________

Pour lire le compte rendu, cliquer ici :

La Corée du Nord range soigneusement les trains qu’on lui offre dans des musées vitrifiés. Séoul, pourtant rasé au sol par la guerre, en compte aujourd’hui une centaine ! Et la ville frénétique fait musée de presque tout. Du sac à main à l’art contemporain en passant par les objets funéraires,
Où le regard se porte, le paradoxe surgit.
Au Nord, l’ultime dictature stalinienne de la planète a érigé une pyramide pharaonique pour abriter les ossements de Tangun, le fondateur mythique (!) de l’épopée coréenne. Le sud partage et révère les mêmes origines, empreinte de Confucius comprise, mais Séoul ne dort jamais et vibre de l’aube à la suivante.

Il revient à l’observateur de tenter de saisir l’essence de la vie coréenne sous d’apparentes extravagances comme ses dizaines de milliers de chamanes. Superposer les religions, comme au Sud, plutôt que se dédier à une confession unique, n’aiderait-il pas à les considérer comme un atout social ? Pourquoi, comment, la brutalité (séparation des familles, exodes, adoption internationale…) des occupations étrangères a t-elle vivifié   la résilience mélancolique des Coréens, leur nationalisme ardent, aiguillonné la créativité, la culture, une littérature construite sur les blessures intimes jamais refermées, un cinéma tissé de singularité et touchant à l’universel. La conscience permanente de la vulnérabilité du pays n’est-elle pas une autre composante de l’humanité parfois bouillonnante de ses habitants ? Comment pourrait-on oublier que l’agglomération-capitale compte la moitié de la population du pays, le double de celle de la région parisienne , vit et travaille à 50 km de la frontière. Au risque permanent du fragile armistice signé   en 1953, des capacités nucléaires et des variations d’humeur de sa voisine du Nord ? D’où l’urgence à jouir, à agir, à créer, à tenter d’assouvir une curiosité invétérée et une rare soif de culture. Y compris un étonnant appétit pour la poésie.   Et les monnaies virtuelles !
Voilà peut-être pourquoi cette étrangeté qui frappe le voyageur lui devient finalement si familière ?

 

 

Ancien professeur aux universités de Busan (Corée du Sud) et Rennes 2 (France), journaliste, écrivain, Jean-Yves Ruaux est l’auteur ou le coauteur de trois livres relatifs à la Corée du Sud : La Corée aujourd’hui (Jaguar, 1987), Seoul City Guide (Ed Vuitton, 2013), Comprendre les Coréens (Editions Riveneuve, 2018). Auteur de nombreux articles, il publie régulièrement ses reportages dans le magazine Culture Coréenne.

 

 

  • Quelques ouvrages sur la Corée :

Jean-Luc Coatalem, Nouilles froides à PyongYang, Poche, Points, Seuil

Martine Prost, Scènes de la vie de Corée, L’Asiathèque

Elisa Shua-Dusapin, Un hiver à Sokcho, Folio

Kim Youngha, Ma mémoire assassine, Picquier Poche

Han Kang, La Végétarienne, Le Livre de Poche

  • Podcasts sur Radio Notre Dame, rubrique Orient Extrême : émissions du 10 mai 2019 et du 3 janvier 2020.