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mardi 10 mars 2015 à 14h00 •

 

Intervenant(e) : Kader BENFERHAT, président du comité des canaux bretons

Ma rencontre avec la Bretagne et ses canaux.

Il y a plus de quarante-huit ans, quand au double hasard d’une vie estudiantine et d’une rencontre après avoir quitté mon oasis  natale du sud saharien, je me suis retrouvé au cours d’une escapade en Bretagne intérieure à Glomel au coeur de la grande tranchée du canal de Nantes à Brest. Fascination certes, mais aussi choc et superposition d’images entre cette profusion d’eau qui brille de ses mille éclats dans les déversoirs et les minces filets qui s’écoulent dans ces oueds oubliés des crues, de mon oasis natale. Dans ce désert à la rigueur desséchante et desséchée où j’ai passé mon enfance je ne peux oublier cette eau captée avec minutie et distribuée avec parcimonie au travers de «seguias» pour irriguer ces palmeraies et donner vie à tout, tout simplement. Voilà que je découvre cette eau, à mes pieds, captée à travers un agencement de biefs, d’écluses, de déversoirs, comme pétrie d’une étreinte humaine. Le mystère d’une telle étreinte m’a poussé à en découvrir la mémoire ainsi que l’histoire de ces canaux, des lettres patentes de François Ier en 1539 autorisant les Rennais à rendre navigable la Vilaine jusqu’à leur situation actuelle de nos jours ! Fabuleuse aventure humaine par l’ampleur de la tâche qui a modelé des paysages, forgé des mentalités et façonné des vies. A travers ces pages d’histoire c’est toute l’identité de la Bretagne qui se révèle : intelligente, ingénieuse, courageuse, relevant tous les défis, ouverte, accueillante, une Bretagne où j’ai décidé de vivre et où j’ai pris racine. Une telle Bretagne, qui sait toujours se souvenir de ses futurs, ne peut abandonner ce patrimoine fluvial si chargé de mémoire, d’humanité, de vie ; elle doit lui donner, par respect de cette mémoire collective, un nouvel avenir, une nouvelle vocation sans doute modernisée. Mais voilà, rendre vivant notre patrimoine des canaux c’est avant tout le réintégrer dans sa fonction originelle, la navigation, et l’affecter à un usage contemporain comme support d’une dynamique économique touristique et d’une interprétation d’un territoire, témoin de l’art, de l’histoire, de la vie des lieux dans lesquels il s’inscrit.